Des sensations proches de l’orgasme, qui durent des heures et des heures... Le syndrome d’excitation génitale persistante est un trouble sexuel rare et méconnu qui altère considérablement la qualité de vie des personnes qui en souffrent. 

Qu’est-ce que le syndrome d’excitation génitale persistante ?

Le syndrome d’excitation génitale persistante (SEGP), encore appelé syndrome d’excitation génitale permanente, est un trouble sexuel caractérisé par une excitation physiologique prolongée de la zone génitale malgré l’absence de désir sexuel ou de stimulation. Bien que ce trouble existe depuis très longtemps, il n’a réellement été décrit qu’en 2001 par les sexologues américaines Sandra R. Leiblum et Sharon G. Nathan. "Cela se manifeste par des épisodes ou des états d’excitation permanente : lubrification abondante, gonflement de la vulve, gonflement du clitoris, sensation de tension dans le petit bassin… Tous les signes que l’on ressent normalement au moment de l’excitation", explique le Dr Pierre Desvaux, andrologue, sexologue, chercheur et expert du syndrome.

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Le secrétaire général du Syndicat national des médecins sexologues est l’un des rares médecins en France à reconnaître l’existence de cette maladie orpheline. "Elle n’est pas du tout niée, mais très peu de médecins connaissent ce syndrome-là. Les patientes affectées s’entendent souvent dire qu’elles relèvent de la psychiatrie. Parfois, on leur dit même : “De quoi vous plaignez-vous ? Ça ne doit pas être désagréable”", rapporte le spécialiste. Le SEGP est parfois confondu, à tort, avec l’hypersexualité et la nymphomanie. 

Certaines femmes ont des phases d’excitation physique pendant quelques heures ou quelques semaines, d’autres pendant plusieurs mois, voire années sans interruption. Ces sensations sont vécues comme très pénibles, obsédantes, intrusives au quotidien, et parfois associées à une anxiété importante, une dépression, et dans les cas les plus graves, des pensées suicidaires. Certaines femmes utilisent la masturbation pour arriver à l’orgasme,  mais le répit est toujours transitoire. Le Dr Desvaux explique que certaines femmes en viennent à se masturber 20 fois par jour. "Ça les calme dix minutes et puis ça revient." On estime qu’approximativement 1% de la population féminine est concernée par le syndrome. "Ça reste rare, mais mon intime conviction, c’est qu’il y en a plus qu’on ne le pense", estime le médecin sexologue.

Quelles sont les causes du syndrome d’excitation génitale permanente ?

Les causes exactes du syndrome d’excitation génitale persistante restent inconnues. Néanmoins, plusieurs pistes ont été évoquées. L’une d’entre elles met en relation la prise d’un traitement antidépresseur et l’apparition des symptômes. Plus précisément, "l’arrêt rapide ou brutal d’antidépresseurs a pu déclencher les choses chez certaines femmes", explique le Dr Pierre Desvaux. "Mais ce n’est qu’une hypothèse, il y a plein de patientes atteintes du SEGP qui n’ont jamais pris d’antidépresseurs de leur vie", nuance-t-il.

Une autre cause pourrait être neurologique. Il est possible qu’une anomalie cérébrale dans la zone frontale, une épine irritative ou que des compressions nerveuses causent cette excitation permanente, précise l’andrologue. La piste nerveuse a aussi été exploitée : une équipe américaine a observé que les femmes atteintes du SEGP avaient plus souvent des petites lésions bénignes des racines nerveuses qu’on appelle des kystes de tarlov. "On a constaté l’association de certaines pathologies avec ce syndrome d’excitation génitale persistante. La première pathologie identifiée est le syndrome des jambes sans repos, relativement bénin", indique le Dr Desvaux. Des auteurs néerlandais ont également remarqué chez les femmes qui souffrent du SEPG la présence de varices pelviennes. "On va faire des IRM de la moelle et des racines sacrées pour rechercher toute lésion qui pourrait titiller le nerf", explique Pierre Desvaux.

Quels traitements pour le syndrome d’excitation génitale persistante ?

Les traitements du SEGP demeurent assez décevants ou peu répandus. Entre tabou, honte et jugement, de nombreuses femmes n’osent pas consulter. D’autres errent souvent de gynécologue en urologue, à la recherche d’un diagnostic et d’un traitement qui les délivrerait. 

L’idée est de procéder par élimination des causes. "Si on trouve quelque chose, on peut proposer de le traiter, tout en sachant qu’on n’a pas l’assurance absolue de guérir du syndrome d’excitation génitale permanente", précise le Dr Desvaux. Les antidépresseurs peuvent être prescrits mais leurs effets varient d’une patiente à l’autre : ils peuvent améliorer les symptômes ou au contraire augmenter le trouble. "Certaines femmes m’ont rapporté ne pas parvenir à atteindre l’orgasme sous antidépresseurs, ce qui ne procure pas de soulagement comme elles pouvaient l’avoir avant". Restreindre l’excitation sexuelle tout en maintenant la vie sexuelle reste un défi. Une étude de 2005 de la professeure Sandra Leiblum, qui avait décrit pour la première fois cette pathologie, signalait que pour diminuer leurs symptômes 51% des patientes se masturbaient, 36 % avaient des rapports sexuels, les autres recourant à l’exercice physique ou à la "distraction cognitive" (penser à autre chose).

Le Dr Pierre Desvaux reconnaît qu’il est très difficile d’aider les patientes atteintes de SEGP. "On est très démunis pour le moment", déplore-t-il. Trouver une aide et une écoute se révèle déjà précieux pour les femmes, qui se sentent seules face à cette maladie. Le Dr Desvaux teste des médicaments et s’adapte à chacune des femmes car toutes ne réagissent pas de la même manière aux traitements. Une prise en charge psychologique et sexologique est souvent indispensable.