Les diktats de la beauté ont la peau dure. Alors que les marques commencent petit à petit à se réinventer grâce à la beauté inclusive, (il était temps !) de trop nombreuses femmes à la peau noire ou métisse veulent blanchir leur épiderme.
La faute à qui ? Certaines stars qui s'éclaircissent la peau peut-être et qui ne véhiculent pas forcément un bon message...

Résultat : un marché très lucratif se développe autour de ces crèmes éclaircissantes. Certains laboratoires n’hésitent pas à insérer dans leurs produits (crèmes, lotions, sérums…) des substances interdites en France car considérées comme dangereuses pour la santé.

Les crèmes blanchissantes, c’est quoi ?

Il existe deux types de crèmes qu’il ne faut pas confondre : les crèmes « anti-taches », commercialisées par des marques, et qui utilisent des actifs tolérés car non nocifs pour la peau. Ces crèmes permettent de dépigmenter les taches noires qui apparaissent à la suite d’imperfections et qui peuvent mettre très longtemps à s'effacer.

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A côté, il y a les crèmes blanchissantes qui utilisent des molécules interdites en France, ces dernières étant jugées dangereuses pour la santé. C’est de cette deuxième catégorie de crèmes dont on parle ici.   

Les crèmes éclaircissantes, c’est pour qui ?

Deux types de femmes utilisent des crèmes pour dépigmenter leur peau.

Tout d’abord, il y a celles qui souhaitent juste camoufler une imperfection. « La peau noire est très fragile, nous explique Abd Haq Bengeloune, fondateur et directeur du Laboratoire IN’OYA, spécialisé dans les peaux noires et mates. Quand il y a une inflammation, comme un bouton d’acné, une tache foncée va apparaître, à l’instar d’une rougeur sur une peau blanche. Sauf que, contrairement à la rougeur qui part au bout de quelques jours, la tâche noire peut mettre jusqu’à 3 ou 4 ans à disparaître. Les jeunes femmes utilisent donc des crèmes blanchissantes pour unifier leur teint ».

Les femmes noires subissent une pression sociale

Ensuite, « il y a les femmes noires qui subissent une pression sociale, poursuit Abd Haq Bengeloune. A leurs yeux, il faut être plus claires pour être belles et être mieux traitées. Elles souhaitent ‘retrouver leur teint métisse’ disent-elles ». Pour ces femmes, le but n'est plus de cacher une imperfection mais bien de devenir plus pâle. On parle alors de « dépigmentation volontaire ». 

Certains fabricants n’hésitent donc pas à mettre des substances controversées dans les crèmes car ils savent qu’ils trouveront des acheteuses vulnérables. « Certaines d’entre elles sont mal informées et ne savent pas qu’il faut se méfier », se désole Abd Haq Bengeloune.

Quels risques prend-on à utiliser une crème dépigmentante ?

Dans les crèmes blanchissantes controversées, on retrouve principalement de l’hydroquinone et des dermocorticoïdes, des actifs toxiques pour la peau.

L’hydroquinone freine la synthèse de la mélanine, c’est pourquoi elle est utilisée dans les crèmes blanchissantes. Sauf que ce composant, à terme, affine la peau et tue une partie de ses cellules. Or une peau affinée résiste beaucoup moins bien aux agressions extérieures. Pire, elle n’est plus protégée.

« Les peaux noires deviennent beaucoup plus sensibles au soleil. On se retrouve avec des cas de cancers de la peau qui n’existaient pas chez les personnes noires auparavant », continue Abd Haq Bengeloune.

L’hydroquinone est pourtant interdite à la vente en France depuis 2001 mais dans les faits, cette substance continue à être utilisée.

Pourquoi ? « Tout comme pour la drogue, il y a de l’argent à se faire, déplore le fondateur d’IN’OYA. Le marché des crèmes blanchissantes représente 10 milliards d’euros dans le monde. Il y a donc un circuit parallèle qui se crée et malheureusement, il arrive à atteindre tout un tas de femmes ».

Les dermocorticoïdes, médicaments utilisés dans le traitement local d’affections de la peau, détruisent aussi le système de défense cutané. De plus, ils peuvent provoquer un dérèglement hormonal et des complications rénales.

Le gros problème de ces crèmes blanchissantes est leur usage prolongé. En effet, leur effet dépigmentant n’est pas éternel, il faut donc en user de manière quotidienne. Et cette application répétée est dangereuse pour la santé.

Outre les risques de cancer et de dérèglement hormonal, des séquelles visibles de l'extérieur peuvent apparaître : vieillissement prématuré de la peau, eczémas, dermatoses, vitiligo, vergetures…  Ils sont plus ou moins réversibles, selon les cas.

« Si la femme utilise une crème blanchissante depuis un ou deux ans, elle peut s’en sortir. En revanche, si cela fait plus longtemps, cela sera plus compliqué. Cela dépend des cas », explique Abd Haq Bengeloune.

Comment savoir si une crème blanchissante est sans risque ?

Selon Abd Haq Bengeloune, il ne faut pas se fier aux étiquettes pour savoir si une crème éclaircissante est saine ou pas, car la présence d’hydroquinone ou de dermocorticoïdes n’est pas toujours indiquée. Certains tubes de crème affichent même « sans hydroquinone », alors qu’ils en contiennent.

En 2010, l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (Afssaps) et la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes (DGCCRF) avaient effectué des analyses sur plus de 160 produits vendus en France.

Les résultats avaient mis en évidence des proportions élevées de produits non conformes à la réglementation des produits cosmétiques et dangereux pour la santé en raison de la présence de substances interdites : environ 30 % en 2009 et 40 % en 2010.

Alors, comment savoir alors si une crème blanchissante est nocive ou pas ? « Il faut se fier au circuit de distribution », répond Abd Haq Bengeloune. Autrement dit, il ne faut pas acheter ces produits dans des boutiques indépendantes, mais aller en pharmacie.

 Il faut considérer l’achat de ces crèmes comme un acte médical

« Il faut considérer l’achat de ces crèmes comme un acte médical. Ces dernières doivent être utilisées uniquement pour résoudre des problèmes de peau et non pour ‘retrouver son teint métis’ », conclut Abd Haq Bengeloune. Il faut donc aller voir un dermatologue qui prescrira une crème anti-tache ou éclaircissante sans danger, et filer à la pharmacie pour se procurer le tube de crème adapté.

>>> Un grand merci à Abd Haq Bengeloune du Laboratoire IN'OYA pour sa disponibilité et son éclairage professionnel.
Retrouvez toutes les infos concernant les crèmes dépigmentantes et les alternatives aux produits toxiques sur le site www.inoya-laboratoire.com.