Morgane, 29 ans, a souffert de vaginisme primaire pendant près de dix ans. Le vaginisme est une contraction involontaire des muscles du vagin qui rend la pénétration impossible ou a minima douloureuse. Ce trouble sexuel représenterait 6 à 15% des consultations en sexologie, selon le Collège national des gynécologues et obstétriciens français (Cngof). Des premiers symptômes à la guérison, Morgane revient sur son combat contre le vaginisme. 

Des premiers symptômes de vaginisme à l’adolescence

Pour Morgane, les premiers symptômes du vaginisme sont apparus à la puberté. «À l’âge de 14 ans, j’ai voulu insérer un tampon et ça n’est pas passé. C’était hyper douloureux», se souvient-elle. Sa première fois, à 16 ans, a été «impossible». Lorsqu’elle essaye la pénétration vaginale avec son petit copain de l’époque, la jeune femme ressent des douleurs intenses. «Au tout début, je me disais “je suis trop jeune, peut-être que lui aussi. On est tous les deux novices, on ne sait pas trop comment s’y prendre”», se remémore-t-elle.

«J’avais entendu que la première fois ça pouvait faire mal, donc je suis restée un peu dans ces croyances erronées. Je pensais que ça viendrait après, naturellement». À ce moment-là, Morgane ne comprend pas vraiment ce qu’il lui arrive. Elle fait des recherches sur internet mais ne trouve pas grand chose et les médecins qu’elle consulte ne la prennent pas au sérieux. 

Errance médicale et violences gynécologiques : un diagnostic difficile

Ce n’est qu’à l’âge de 25 ans que Morgane obtient un diagnostic. Lors d’une consultation avec un médecin traitant pour changer de contraception, elle est enfin écoutée. «Elle m’a dit : “Je ne vous ai pas prescrit l’ordonnance pour vérifier que vous n’étiez pas enceinte”. Je lui ai lancé : “Ne vous inquiétez pas, pour ça il faut qu’il y ait pénétration et nous on a à peine les préliminaires”», raconte la jeune femme. «Elle a creusé un petit peu et quand je lui ai décrit les symptômes, elle m’a dit : “Vous avez un vaginisme”». La médecin la rassure alors en lui disant qu’il est possible d’en guérir et l’oriente vers une kinésithérapeute spécialisée.

Avant ce diagnostic, Morgane a connu cinq années d’errance médicale. «Ça a été des traitements pour des mycoses, ça a été des violences gynécologiques où on m’a inséré le spéculum sans prendre en compte mon vécu, mon historique, ou même ce que je disais sur le moment, ma douleur», déplore la jeune femme. Elle revient d’ailleurs sur une expérience traumatisante chez un spécialiste de la vulve : «Il m’a inséré le spéculum comme ça, à sec. Je lui ai demandé de le retirer parce que ça faisait vraiment trop mal. Il l’a retiré, il a mis du lubrifiant, il l’a réinséré. Et là, je me suis mis à pleurer, je lui ai demandé d’arrêter. Il m’a regardé et m’a dit : “Mais vous avez si mal que ça pour pleurer ?”». De salles d’attentes en cabinets, elle se heurte au corps médical comme à un mur. «On m’a dit un nombre de fois incalculable : “C’est le stress, c’est dans la tête”».

Une prise en charge physique et psychologique pour guérir du vaginisme

Il y a autant de causes de vaginisme que de personnes atteintes. Une approche multidisciplinaire optimise les chances de guérison. Il faut apprendre au cerveau à ne plus envoyer le signal au périnée de se contracter. «Il y a aussi tout l’aspect connaissance du corps, état d’esprit, croyances limitantes, les blessures avec lesquelles on a grandi à travailler», juge Morgane. Le travail des médecins consiste avant tout à déconstruire des schémas mentaux et reprendre les bases de l’anatomie.

C’est chez la kiné que Morgane entame ce travail salvateur. «On a travaillé principalement la rééducation périnéale, avec des dilatateurs, avec des électrodes pour essayer de détendre toute la zone musculaire et avec les doigts. On a travaillé aussi la connaissance du corps», détaille-t-elle. Au bout de six mois de suivi, «les pénétrations sont possibles, mais douloureuses», explique Morgane.

La jeune femme décide alors de se concentrer sur l’aspect psychologique. Elle suit l’accompagnement thérapeutique de Mame Badiane, coach certifiée, experte en guérison du vaginisme et autrice de Je guéris du vaginisme, c’est parti (éditions Jouvence). En quinze jours, son vaginisme est traité. C’est la fin de dix ans de blocage et de douleurs. 

Pour Morgane, il est primordial de rappeler que le vaginisme se soigne et qu’on en guérit dans la majorité des cas. La jeune femme conseille de «se faire accompagner et trouver la meilleure méthode», pour s’épanouir personnellement et sexuellement. «Pour moi, ça a été l’accompagnement thérapeutique qui a été libérateur. Il y en a pour qui ça va être la kiné, l’ostéo, l’hypnose... Le tout c’est d’avoir confiance en soi, en son praticien et en la méthode qu’on choisit», précise-t-elle. L’association les Clés de Vénus consacrée aux douleurs sexuelles a édité un annuaire qui recense les professionnels sensibilisés au vaginisme et aux dyspareunies. 

Avoir du plaisir autrement et sortir de la sexualité pénétro-centrée

Le vaginisme a, malgré tout, amené Morgane à avoir du plaisir autrement. «Ça m’a permis d’éveiller ma curiosité sur le sujet et de tester plus de choses que je n’aurais peut-être pas faites si je m’étais arrêtée à la pénétration vaginale», assure-t-elle. Pour cela, il faut repenser les rapports et sortir d’une sexualité phallo et pénétro-centrée. «Aujourd’hui, beaucoup pensent encore que la pénétration vaginale est le point final d’un rapport sexuel ou le but ultime», regrette-t-elle. Pourtant, faire l’amour sans pénétration est tout aussi bon, parfois même meilleur. «Le nombre de fois où j’ai eu plus de plaisir hors pénétration vaginale qu’avec une pénétration vaginale, c’est quand même hallucinant !», sourit-elle.

Le vaginisme demande au couple d’aller vers d’autres pratiques, non pénétrantes, mais qui peuvent tout à fait être très satisfaisantes pour chacun·e. «Un rapport sexuel c’est des bisous langoureux, c’est de la sensualité, c’est toutes les zones érogènes du corps : ça peut passer par le cou, la poitrine... Le rapport sexuel ne se limite pas à la pénétration», insiste la jeune femme. Le soutien du ou de la partenaire est également primordial dans le chemin vers la guérison.