« Alors, t’as joui ? ». L’orgasme est souvent considéré comme le climax d’une relation sexuelle, le but à atteindre qui sonne, bien souvent, le glas du rapport. D’autant plus s’il est simultané. À tort ou à raison. Car l’orgasme, comme à peu près tout dans le sexe, est une chose très personnelle.

Une personne peut prendre beaucoup de plaisir lors d’un rapport sexuel sans pour autant atteindre la jouissance. Ou au contraire, enchaîner les orgasmes - coucou l’orgasme multiple ! -, la jouissance ne signant pas nécessairement la fin du coït. Certain(e)s en feront leur eldorado tandis que d’autres ne se focaliseront pas dessus.

Bref, vous l’aurez compris : en matière d’orgasme et de jouissance il n’y a pas franchement de règles, si ce n’est le consentement, bien évidemment.

Comment fonctionne l’orgasme chez la femme et chez l’homme ? 

Pour mieux le comprendre et le provoquer, il est important de connaître les phénomènes physiques qui se jouent pendant l’orgasme. Étudié de près dans les années 60 par les sexologues américains William Howell Masters et Virginia Eshelman Johnson - qui ont inspiré la série Masters of Sex -, l’orgasme masculin, comme l'orgasme féminin, est une réponse physique au plaisir ressenti. Tout simplement. 

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« L’orgasme se caractérise par un plaisir physique intense véhiculé par le système nerveux autonome, accompagné de cycles de contractions musculaires rapides dans les muscles pelviens entourant les organes sexuels et l’anus, et est souvent associé à d’autres actions involontaires telles que des spasmes musculaires dans d’autres parties du corps et un sentiment général d’euphorie », nous explique Coraline Delebarre, psychologue et sexologue dans le 9e arrondissement de Paris et au Centre gratuit d'information, de dépistage et de diagnostic du CHU de Montreuil. « Le sentiment de jouissance lié à l'orgasme est provoqué par une décharge chimique de neurotransmetteurs : les endorphines », poursuit l’experte.

Lors de la montée du plaisir féminin et masculin, plusieurs facteurs physiques entrent en jeu et notamment une production de dopamine, une augmentation du rythme cardiaque et de la pression artérielle, une érection du pénis et du clitoris et une lubrification des zones génitales. « S’ensuit alors une phase où l'on ressent du plaisir aux stimulations, jusqu’à un point de non-retour ou apparaît l'orgasme en tant que phase culminante de cette excitation », souligne la psychologue sexologue.

Orgasme clitoridien, orgasme vaginal et autres idées reçues sur l’orgasme

Il suffit de faire un tour sur Google pour s’apercevoir que les idées reçues autour de l’orgasme ont la peau dure. Parmi les requêtes les plus tapées en matière de jouissance : « orgasme clitoridien » et « orgasme vaginal ». « On entend souvent parler de l’orgasme vaginal et clitoridien comme s’il existait deux orgasme distincts. Ce qui n’est pas le cas », clarifie Coraline Delebarre.

Pourquoi ? Un petit cours d’anatomie s’impose. « Le seul organe du plaisir chez les personnes ayant une vulve et un vagin est le clitoris, rappelle notre experte, doté d’une partie externe et interne (deux racines d’une dizaine de centimètres), ses ramifications entourent le vagin. De fait, lorsque le vagin est stimulé par la pénétration, le clitoris l’est également et c’est surtout lui qui intervient ici. »

Si l’orgasme a lieu grâce à la pénétration - avec un pénis, un sextoy, des doigts… - il y a donc fort à parier que c’est la stimulation interne du clitoris qui le déclenche. L’orgasme vaginal serait donc bien souvent une forme d’orgasme clitoridien. Un sujet qui divise malgré tout les sexologues, certains d’entre eux à l’instar de la française Françoise Dolto et de l’américain Barry Komisaruk considérant que la jouissance féminine peut avoir lieu sans l’intervention du clitoris, par la stimulation du point G notamment. 

Autre idée reçue sur l’orgasme : l’orgasme féminin serait dans la tête. Mais pas chez l’homme, chez qui la jouissance serait davantage physique. « L’orgasme se compose de réactions physiologiques et chimiques spécifiques mais pour qu’il soit possible, il est important de lâcher prise et d’avoir un bon rapport à la sexualité et à son corps », rappelle la psychologue sexologue.

« L’orgasme est donc à la fois physique et psychologique que ce soit pour les femmes que pour les hommes. En revanche, il est vrai que les attentes sociales et sexuelles, les peurs et les inhibitions jouent un rôle dans la capacité à lâcher prise », souligne Coraline Delebarre. 

Et c’est là que le bat blesse. Car en termes de pressions sociales, les femmes ont tiré le gros lot. En matière de sexe, elles sont le choix - depuis l’Antiquité - entre le rôle de la madone ou celui de la putain. Concernant leur apparence, on leur fait gentiment comprendre que leur corps n’est pas désirable s’il ne rentre pas dans un petit 38. Ou s’il a des poils. Ou s’il a de la cellulite. Des injonctions tenaces qui se glissent sous nos draps… et perturbent la jouissance féminine. 

« ‘Vais je avoir mal ?’, ‘Suis-je suffisamment à la hauteur ?’, ‘Suis-je assez attirante ?’… Toutes ces pensés parasites peuvent avoir un impact sur la capacité à lâcher prise et à jouir pour les femmes. Coincées entre l’image de la femme prude et de la femme légère, il n’est pas facile de se placer », ajoute la sexologue.

Les hommes sont eux aussi mis sous pression, mais sur d’autres aspects. « Les angoisses seront plutôt du côté de la performance et de la virilité chez les hommes. Être ‘un vrai mec’, ‘un bon coup’, ‘réussir à le/la faire jouir’, ‘durer longtemps’… », souligne notre experte. Une pression qui là aussi joue sur l’orgasme, mais aussi sur la capacité à avoir et tenir une érection.

Comment avoir un orgasme ?

Il n’y a pas malheureusement pas de recette magique. Ou une technique universelle qui fonctionnerait sur tout le monde. Atteindre l’orgasme n’est pas toujours évident, celui-ci ne relevant pas seulement d’une mécanique du corps. C’est un phénomène qui se joue aussi dans la tête et qu’on ne contrôle pas forcément. 

Malgré tout, le contexte est essentiel. Vous devez vous sentir à l’aise, en confiance, avec une personne qui se préoccupe de votre plaisir et que vous désirez. « Ressentir du désir, de l’excitation est un prérequis important », rappelle l’experte.

Chacun et chacune possède ses propres chemins pour atteindre l’orgasme, bien qu'il existe des zones érogènes chez l'homme et des zones érogènes chez la femme. Des chemins que vous pouvez explorer en solo, en vous masturbant, avec ou sans sextoy. Car l’orgasme ne se partage pas forcément et peut bien évidemment s’expérimenter grâce aux plaisirs solitaires. Une bonne façon d’apprendre à se faire du bien… et ainsi déterminer ce qui fonctionne sur vous.

Reste ensuite à discuter de vos préférences avec votre partenaire et lui indiquer le chemin à prendre pour vous procurer un maximum de plaisir. Communiquez avec lui/elle pour lever les tabous, et notamment autour de l’orgasme anal ou prostatique et des plaisirs du point P.

Par ailleurs, le fait d’arrêter de se focaliser sur votre jouissance est aussi un moyen d’atteindre finalement l’orgasme. Un peu comme le fait de trouver l’amour. Vous savez, cette idée - légèrement agaçante - selon laquelle « c’est quand on s’y attend le moins que ça arrive toujours » ? Et bien pour l’orgasme, c’est un peu la même chose. Selon Coraline Delebarre, il est en effet essentiel de se « décentrer de la pression à jouir. Plus on se focalise sur l’injonction à jouir, plus il est difficile d’y arriver. »

Concentrez-vous donc sur votre plaisir, vos sensations, et ne considérez plus l’orgasme comme le but à atteindre de chacun de vos ébats. Celui-ci pourrait bien vous surprendre et s’inviter sous vos draps, l’air de rien.